Shy

Shy

Shy de Plume de Marmotte, 2017. Tous droits réservés.

Les habitants de Lydion sont fiers et comment le leur reprocher ? Leur ville est un paradis sur Terre. Elle est réputée pour sa vie nocturne riche : ses gigantesques opéras aux divas virtuoses et ses petits théâtres intimistes ; pour sa gastronomie : ses pâtisseries familiales sur les quais, ses grands restaurants dans le centre historique ; pour ses divertissements ; pour ses talentueux artistes de rues et surtout pour son grand parc d’attraction de renommée mondiale : Les Jardins de Pluton.

La particularité des Jardins, c’est son mélange unique d’immenses attractions permanentes, qui font la réputation du parc, et d’autres, plus modestes et temporaires, organisées par des groupes de nomades. Cette variété lui donne une atmosphère empreinte de magie et de mystère. Le plan n’est jamais le même, d’un jour sur l’autre, le visage des Jardins change du tout au tout.

Dans les tréfonds du parc, loin dans le quartier des forains, dans une ruelle dont l’entrée est cachée par de grandes toiles violettes, se trouve la plus petite et la plus ridicule des attractions : un chamboule-tout. J’ai été très surpris de tombé dessus, à vrai dire, je cherchais les toilettes.

« Bonjour, jeune homme. Tu viens tenter ta chance au Grand Chamboule-Tout de Pluton ? » m’alpague l’homme frêle qui tient le stand. Je le regarde pendant une seconde. Vêtu d’un costume fantaisie rapiécé, ce qui marque c’est son masque, il est aussi imposant que son porteur est chétif.

« Ah, ben pourquoi pas. Qu’est-ce que je gagne ?
— Pas de lot ici mon garçon, cabotine-t-il, se désarticulant derrière son comptoir. Au Grand Chamboule-Tout de Pluton, on mise et on souhaite.
— Je comprends pas.
— Bien, dit-il après un temps de réflexion, alors je t’offre un coup pour rien. »

Il me tend une balle. Je le regarde un moment. Je la prends, je la lance à la base des conserves : la tour s’effondre. Un peu surpris, je le dévisage d’un air interrogatif. « Bien joué, gaillard, ton souhait est exaucé », m’annonce-t-il en me pointant la direction d’une porte d’un cabinet de toilette, juste à côté de moi, que je n’avais pas vu. Comment j’avais fais pour ne pas le voir ?

Sortant des toilettes, ayant eu un temps de réflexion, je décide de le mettre au défi, l’air déterminé j’annonce : « Bien ! Je souhaite la richesse et la gloire !
— Contre quoi ? demande-t-il, taquin.
— De l’argent ?
— Non, quelque chose qui a plus de valeur.
— Quoi ?
— Et bien… fait-il, l’air de faussement réfléchir. Pourquoi pas 30 années de services par exemple ? »

Je sens que je transpire un peu, je déglutis. « Marché conclu » dis-je du bout des lèvres, un léger tremolo dans la voix. Il me tend une balle que je prends. J’essaie de me rassurer pour arrêter mon bras de trembler. A-t-on jamais vu un pari mal tourner ?

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